Daniel Amphoux Trésorier
RENDEZ-VOUS A l'occasion des "Etats généraux
de l'écologie politique", Daniel Garnier, Secrétaire de
l'AMFP-Marseille, interviendra le samedi 13 mai 2000 à partir
de 14h30, dans les locaux du journal Taktik - 55 cours Julien (Marseille
6°) sur la situation des Territoires palestiniens
aujourd'hui. (Entrée libre - Métro ou parking Cours
Julien)
TELEVISION Femmes de
Palestine documentaire diffusé sur
Téva le samedi 6 mai 2000 de 08:00 à 08:30 (30 min)
La lutte des femmes palestiniennes en faveur du
changement. Les accords de paix signés entre Rabin et Arafat en septembre 1993
ont ouvert la voie vers une autonomie partielle des territoires palestiniens, et
ce après cinquante ans de conflits particulièrement violents. Les femmes, qui
pendant les affrontements remplacèrent souvent les hommes, emprisonnés ou
exilés, mènent maintenant une lutte sans merci pour leur dignité et celle de
leur peuple. Dans les camps où elles travaillent, elles tentent notamment de
conserver leur culture.
TELEVISION Le XXe
siècle - Palestine, la première intifada
documentaire diffusé sur TPS Histoire le mercredi 10 mai 2000
de 21:00 à 22:00 (60 min) réalisé par Antonia Benedek
Entre 1936 et 1939, la répression d'un soulèvement
palestinien par les autorités britanniques fait figure de "première
intifada". A la fin des années 80, les Palestiniens
manifestent leur hostilité à l'autorité israélienne. La "guerre des pierres"
fait des centaines de morts et des vagues dans l'opinion internationale.
Pourtant dès 1936, les Palestiniens se levaient pour réclamer plus d'autonomie.
Le pays, alors sous mandat britannique, fut troublé par la révolte armée des
paysans, réprimée avec une sévérité semblable à celle des Israéliens cinquante
ans plus tard. L'essentiel de cet épisode de l'histoire palestinienne a été
éclipsée par la révolte juive qui a suivi la guerre et abouti à la fin du mandat
britannique.
Au sommaire du 56° POINT D'INFORMATION PALESTINE DU
03/05/2000 :
- Israël : Ehoud Barak lutte pour conserver sa coalition
gouvernementale par Georges Marion in Le Monde du mercredi 3 mai
2000
- Directeur du bureau politique du président syrien Hafez Al-Assad,
Riyad Naasan Agha, également penseur, parle du processus de paix et de la
situation du monde arabe au début du XXIe siècle propos recueillis
par Atef Saqr in Al Ahram Hebdo du mercredi 3 mai 2000
- Le ministre palestinien des Affaires parlementaires, Nabil Amr,
demande aux Etats-Unis de s'investir davantage. Au moment de la repise des
négociations... et de la colonisation propos recueillis par Mohamed
Amin Al-Masry in Al Ahram Hebdo du mercredi 3 mai 2000
- Les ministres des Affaires étrangères de Syrie, d'Egypte et
d'Arabie saoudite se réunissent ce mercredi en Syrie pour évoquer les moyens
de "ranimer" le processus in Al Ahram Hebdo du mercredi 3 mai
2000
- La colonisation reprend par Rania Adel in Al Ahram Hebdo
du mercredi 3 mai 2000
- Israël persiste et signe. Il ne veut pas renoncer à l'arme
nucléaire, contre la volonté de l'ensemble de la communauté internationale
in Al Ahram Hebdo du mercredi 3 mai 2000
- Atarot, un aéroport en partage ? par Serge Dumont in Le
Soir (quotidien belge) du mardi 2 mai 2000
- Les colons juifs organisent la résistance in Le Soir
(quotidien belge) du mardi 2 mai 2000
- Proche Orient: l'émissaire U.S. Dennis Ross se rend à Eilat
par Wafa Amr Dépêche de l'agence Reuters du mardi 2 mai 2000,
20h53
- Les "aveux" du principal accusé juif font craindre un verdict
sévère Dépêche de l'Agence France Presse du mardi 2 mai 2000,
13h22
- Arafat résolu à proclamer un Etat palestinien en septembre
Dépêche de l'agence Reuters du mardi 2 mai 2000,
9h32
- Jérusalem-Ankara les dessous d'une alliance par Walid
Charara in Regards du mois d'avril 2000
- La nébuleuse terroriste en mutation, selon Washington
Dépêche de l'Agence France Presse du lundi 1 mai 2000,
17h20
- Le procès des Juifs iraniens prend une tournure délicate
Dépêche de l'Agence France Presse du lundi 1 mai 2000,
17h03
- Le droit à un Etat indépendant n'est pas négociable pour les
Palestiniens Dépêche de l'Agence France Presse du lundi 1 mai 2000,
15h57
- Portrait d'Elias Khoury : Le singulier universel par
Roula Mouaffak in Le Magazine (hebdomadaire libanais) du 28 avril
2000
REVUE DE PRESSE PALESTINE
1. Le Monde du mercredi 3 mai
2000
Israël : Ehoud Barak lutte pour conserver sa coalition
gouvernementale par Georges Marion notre correspondant à
Jérusalem
Après l'avoir longtemps battu froid, le rabbin Ovadia Yossef, leader
spirituel du Shass, parti des ultra-orthodoxes séfarades qui contrôle 17 députés
à la Knesset, a finalement accepté de rencontrer Ehoud Barak dont le
gouvernement compte dans ses rangs quatre ministres et trois secrétaires d'Etat
du même parti. La rencontre a eu lieu dimanche 30 avril, au domicile du rabbin,
alors que la soirée était déjà bien avancée, sans journalistes pour interroger
les personnalités à la sortie ni photographes pour immortaliser la scène.
L'entrevue n'était, il est vrai, guère glorieuse pour le premier ministre dont
les émissaires frappaient sans succès à la porte du rabbin depuis déjà plusieurs
jours. Dimanche soir, le saint homme s'est finalement laissé fléchir, espérant
empocher, pour prix de sa bonté, de quoi relever son réseau d'écoles rabbiniques
proche de la faillite.
A-t-il été récompensé ? Lundi, personne n'a voulu donner le résultat
chiffré de l'entrevue - les indiscrétions les plus extrêmes, voire les plus
farfelues, parlent de sommes allant de 17 à 85 millions de francs - mais
personne non plus n'a affirmé que les deux hommes avaient passé leur soirée à
étudier la Thora.
Car, selon toute vraisemblance, c'est bien d'argent dont ils ont parlé,
sujet qui oppose, depuis maintenant plusieurs mois, le ministre de l'éducation
nationale, Yossi Sarid, et le Shass. Le premier, chef du parti Meretz, formation
laïque de gauche, est en effet fermement opposé à ce que l'Etat augmente sa
participation financière dans le réseau des écoles religieuses du Shass, arguant
que le parti aura tôt fait de diriger la manne vers d'autres horizons que ceux
de l'éducation." Si le Shass reçoit les subsides qu'il réclame, a prévenu M.
Sarid , je démissionne et, avec moi, les autres ministres de mon parti. "Or le
Shass a un urgent besoin de cet argent pour faire fonctionner ses écoles, outil
important de son influence politique, et accessoirement moyen de nourrir une
partie de ses cadres. Alors que son électorat appartient plutôt à la droite
populaire, le parti n'a accepté de s'allier à Ehoud Barak que pour continuer à
bénéficier des largesses de l'Etat. Mais en la personne de Yossi Sarid il est
tombé sur un adversaire têtu, fatigué des prébendes diverses consenties aux
partis religieux. Depuis des mois, le ministre non seulement refuse de débloquer
les fonds, mais aussi de donner des responsabilités à son secrétaire d'Etat,
Meshoulam Nahari, au prétexte que ce dernier appartient au Shass.
AU PLUS MAUVAIS MOMENT
Le parti religieux a d'abord haussé le ton, s'est échauffé en votant
quelques textes avec l'opposition, puis a menacé Yossi Sarid des foudres divines
sur un ton qui vaut au rabbin Yossef d'être l'objet d'une enquête préliminaire
pour incitation à la violence. Enfin, à bout de patience, le Shass a annoncé
qu'il quitterait le gouvernement s'il ne recevait pas son argent. Ehoud Barak
qui, jusque-là, s'était bien gardé d'intervenir, est finalement descendu dans
l'arène pour tenter de recoller les morceaux.
Quelle solution a-t-il imaginé alors que céder à l'un équivaut à se séparer
de l'autre et inversement ? Nul ne le sait encore. La seule chose qui paraît
certaine, c'est que M. Barak n'aurait accepté de donner l'argent convoité que si
le Shass se conduisait désormais en partenaire loyal, ce qu'il se serait engagé
à être.
Quoi qu'il en soit, cette crise intervient au plus mauvais moment pour un
premier ministre aux prises avec les difficultés de la négociation
israélo-palestinienne. Tout entier absorbé par ses pourparlers avec les Syriens,
M. Barak a longtemps négligé le côté palestinien de ses problèmes. Maintenant
que la négociation avec Damas a capoté, le chef du gouvernement, qui a un urgent
besoin de succès politique, a relancé le volet palestinien, promettant quelques
concessions pour amadouer ses interlocuteurs. Depuis dimanche, à Eilat, ses
représentants font face à leurs interlocuteurs palestiniens, essayant de
respecter les contraintes d'un calendrier souvent remanié.
Parmi les mesures susceptibles de manifester sa bonne volonté, M. Barak a
notamment laissé entendre qu'il s'apprêtait à remettre à l'Autorité
palestinienne trois localités arabes jouxtant Jérusalem, parmi lesquelles Abou
Dis, où pourrait s'installer le Parlement palestinien, voire, selon certains, la
capitale du futur Etat palestinien. La perspective de la restitution d'Abou Dis
a aussitôt soulevé les protestations des partis de droite membres de la
coalition. Cette fois, c'est le Parti national religieux (PNR) et les
russophones d'Israël Be Alya qui menacent de quitter le bateau gouvernemental.
Pour les premiers, toute restitution aux Palestiniens de territoires qu'ils
considèrent comme " la terre sacrée d'Israël " est tout simplement
inenvisageable ; pour les seconds, se séparer d'Abou Dis dans une étape
préliminaire de la négociation obligera à se séparer d'une meilleure carte
encore lorsqu'il faudra boucler l'accord final.
M. Barak en est donc à courir pour rapiécer les morceaux d'une coalition
dont les composantes manifestent de fortes tendances centrifuges. Habile, il a
jusqu'ici toujours su remonter la pente. Mais la répétition de ces épisodes
affligeants commence à donner une bien mauvaise image d'un gouvernement chiche
en succès.
2. Al Ahram Hebdo du
mercredi 3 mai 2000
Directeur du bureau politique du président syrien Hafez Al-Assad,
Riyad Naasan Agha, également penseur, parle du processus de paix et de la
situation du monde arabe au début du XXIe siècle propos recueillis par
Atef Saqr
La cause arabe est aujourd'hui mieux comprise
Al-Ahram Hebdo : Etes-vous optimiste sur les chances d'aboutissement du
processus de paix israélo-arabe ?
Riyad Naasan Agha : Les prémices d'un optimisme quant à l'avenir arabe se
profilent à l'horizon. A l'échelle internationale, la cause arabe a occupé le
devant de la scène. Un intérêt mondial a été particulièrement accordé au
processus de paix, pour mettre un terme au conflit arabo-israélien et récupérer
les droits arabes. Les années 90 ont été le témoin d'une meilleure compréhension
internationale des droits et des intérêts arabes. Le monde entier a réalisé que
les Arabes sont les détenteurs de droits et se veulent de fervents apôtres de la
paix. C'est là une évolution qui sans doute se répercutera de manière positive
sur l'avenir arabe.
Malgré cela, il existe de nombreux malentendus dans certains médias. Par
exemple, les Arabes et les musulmans sont présentés par ces médias comme des
terroristes et leur image est défigurée. Il faut consacrer à ce sujet des
efforts multipliés au cours des prochaines années, pour mettre à nu toutes les
réalités devant l'opinion internationale. D'autant que la révolution des
communications pourra aider à réaliser cet objectif.
- Pensez-vous que la diffusion par satellite présente un danger culturel
pour le monde arabe ?
- La diffusion par satellite a présenté des solutions rapides à la nation
arabe pour la problématique de la communication et de la complémentarité
culturelle entre Arabes. Nous espérons que les médias de nos pays feront un bond
en avant, pour mieux communiquer avec le monde à travers des chaînes
internationales qui sont diffusées dans toutes les langues vivantes afin
d'expliquer les causes arabes et approfondir les liens du peuple arabe avec ceux
des cinq continents.
- Quelles seront les priorités de la Syrie après l'aboutissement du
processus de paix ?
- Quand le processus de paix actuel parviendra à une paix juste et globale
dans la région, les prochaines générations auront l'occasion de poursuivre le
développement global. Le XXe siècle est fini, mais la nation arabe continue de
souffrir de maux sérieux en dépit des accomplissements réalisés. Nous souffrons
toujours des problèmes de l'analphabétisme, de l'analphabétisme culturel, de la
désertification, du chômage, de la faiblesse du commerce interarabe et de
l'incapacité de bénéficier des ressources et des richesses naturelles sur toute
l'échelle arabe. Nous avons également le problème de l'énormité des importations
de biens alimentaires et de consommation outre ceux de logements. Ces questions
occuperont la première place durant la première décennie du troisième
millénaire.
- Ne pensez-vous pas que les divergences arabes sont autant d'obstacles au
développement du monde arabe ?
- Les divergences arabes ont gravement porté atteinte au vécu de la nation
arabe et à son avenir. Cependant, la plupart d'entre elles s'inscrivent et se
cantonnent dans un cadre officiel, et c'est ce qui fait revivre en nous l'espoir
de leur trouver une solution. D'autant plus que le peuple arabe se considère
comme une seule famille. La preuve en est sa réaction contre l'agression que
subit le peuple iraqien et contre l'embargo sur la Libye. N'oublions pas que
tous les membres de la famille arabe ont un sens élevé de la tolérance entre
eux. Ils ont une aspiration à un avenir meilleur. Etant donné que de nombreuses
divergences arabes sont artificielles et résultent de complots visant à
fragiliser et à affaiblir la nation arabe, il est à espérer qu'on trouvera une
solution adéquate, surtout que les Arabes sont à l'heure actuelle mieux armés et
sensibilisés quant aux dangers de la persistance de ces divergences.
- Croyez-vous que la mondialisation menace l'identité arabe ?
- Cette identité n'est pas du tout menacée en raison de ses racines
profondes et de ses caractéristiques bien définies. La preuve en est l'échec de
la première croisade il y a environ 1 000 ans. Ensuite, il y a eu les Mamelouks
qui, appartenant à plusieurs nationalités, ont gouverné la nation arabe et
islamique. Puis il y a eu le règne des Ottomans qui a duré 4 siècles. C'était
ensuite au tour des colonisations britannique, française et italienne. Tout ceci
n'a guère effacé les traits distinctifs de la langue, de la culture et des
traditions. La nation arabe a été la seule à résister à l'invasion culturelle
des occupants et à préserver sa propre identité culturelle. C'est pourquoi nous
avons des raisons de nous rassurer sur l'avenir de l'identité de la nation, qui
s'attache à la langue du Coran, protégée par Dieu.
Le panarabisme est une identité bien définie, et la mondialisation ne
constitue guère une menace pour les cultures. Au contraire, la mondialisation
ouvre devant l'arabisme des horizons de dialogue et de communication et permet
aux Arabes la diffusion de leur culture en accentuant le rôle historique de leur
civilisation. Je pense que les sociétés européennes et américaines subiront
durant la seconde moitié de ce siècle une influence importante de la culture
arabe.
- Vous parlez de l'arabisme en tant qu'identité de la nation arabe. Mais ne
pensez-vous pas que la montée de l'islam politique a fait de l'ombrage à cet
arabisme ?
- Il est important d'établir une compréhension entre les tenants des
courants islamique et panarabe afin de mettre un terme à la divergence
artificielle qui les oppose. Tout ceci contribuerait à mettre fin aux
incessantes tentatives visant à déformer l'image de l'islam et de l'arabité. Il
semble que des forces étrangères sont derrière les tendances extrémistes et
fanatiques arabes qui ont été le lot de la région arabe des années durant et qui
lui ont porté un grave préjudice. Ces forces étrangères ont sans nul doute
contribué à créer cette séparation, ou ce fossé artificiel entre le discours
nationaliste et le discours islamique, alors qu'en réalité, ils sont
indissociables, voire parfaitement homogènes.
L'islam est l'aspect civilisationnel et le message planétaire de
l'arabisme. Du point de vue de la civilisation, l'islam est une conclusion de
toutes les religions qui l'ont précédé. Quant à l'arabisme, il est le contenu,
en termes de temps, d'espace et de population, de la pensée islamique. Certains
penseurs du courant nationaliste arabe ont fait une erreur lorsqu'ils ont
minimisé l'importance de l'islam dans la composition de l'arabisme. Ils n'ont
pas réalisé que l'arabisme était le corps et que l'islam était l'âme. De même,
les intellectuels de tendance islamique ont eu tort de considérer que l'appel au
nationalisme arabe était vain, ignorant que le panarabisme était la mère du
message religieux.
- Les intellectuels arabes ont-ils ici un rôle à jouer ?
- Je pense que les tentatives de révision approfondies élaborées par les
intellectuels et les penseurs arabes sont positives. Ces révisions remettent en
question la période de la renaissance, mais formulent les réponses avec une
profonde compréhension des changements internationaux, du phénomène de la
mondialisation, de la révolution technologique et de celle des communications.
Ces tentatives bénéficient des accomplissements arabes dans les domaines de
l'enseignement supérieur et de l'introduction de la technologie, ainsi que des
expériences de démocratie, de l'élargissement de la participation populaire et
du pluralisme.
Il existe aussi une conscience populaire arabe sur la nécessité de revenir
au système de valeurs arabes authentiques dans les programmes éducatifs.
Une meilleure formation des générations futures capables d'assumer charges
et responsabilités sera à l'origine de tout essor. Il est indéniable que les
différents médias assument une responsabilité considérable dans ce
domaine.
3. Al Ahram Hebdo du
mercredi 3 mai 2000
Le ministre palestinien des Affaires parlementaires, Nabil Amr,
demande aux Etats-Unis de s'investir davantage. Au moment de la repise des
négociations... et de la colonisation propos recueillis par Mohamed
Amin Al-Masry notre correspondant à Gaza
Les Américains doivent être plus que des arbitres
Al-Ahram Hebdo : Alors que les Israéliens et les Américains sont optimistes
quant à l'aboutissement du processus de paix, les Palestiniens ne le sont pas.
Pourquoi ?
Nabil Amr : La dernière période a témoigné de plusieurs événements
politiques qui ont affecté le processus de paix, dont le plus important est la
poursuite de la colonisation intensive. En outre, chaque fois qu'il y a un
blocage sur le volet syrien, le premier ministre israélien, Ehud Barak, assure
qu'il accordera plus d'intérêt au volet palestinien. Cette attitude ne nous
satisfait pas. Le volet palestinien ne doit pas être utilisé pour exercer une
pression sur un autre volet. Il est aussi important que les autres. D'autre
part, les membres des délégations palestinienne et israélienne ont passé des
dizaines d'heures dans des négociations à Washington sans parvenir à des progrès
concrets. N'oublions pas que la troisième phase du redéploiement doit avoir lieu
dans un mois et qu'un accord-cadre doit être conclu en mai afin de signer en
septembre l'accord final. Le temps passe et il y a peu de progrès.
- Les négociateurs palestiniens ont menacé à plusieurs reprises de
boycotter les négociations en cas de poursuite de la colonisation, mais il ne
l'ont jamais fait. Pourquoi ?
- Notre crise actuelle avec Israël n'est pas une crise de négociations,
mais c'est plutôt la crise de ce qui se passe dans les territoires. La
colonisation, notamment autour de Jérusalem, alors qu'on est censé avoir affaire
à un gouvernement de paix israélien, a provoqué l'indignation de la société
palestinienne. Il ne faut pas parler de paix, alors qu'on procède à des mesures
qui la contredisent. Si les Israéliens respectent les principes de la paix, nous
serons tout à fait coopératifs. S'ils continuent à tergiverser, ceci mènera à
des conséquences néfastes qu'on ne peut pas prédire.
- Pourquoi les Américains continuent-ils à afficher leur optimisme, alors
que le volet palestinien traverse une crise ?
- Les Américains préfèrent le plus souvent entretenir une ambiance
d'optimisme parce qu'ils parrainent le processus de paix, et ne veulent pas
qu'on dise qu'il se détériore. Nous comprenons cela et nous l'apprécions.
Toutefois, cela ne doit pas les empêcher de fournir tous leurs efforts pour
sauver le processus de paix du doute et du scepticisme qui se sont installés.
Nous demandons aux Américains de s'asseoir avec nous à la table des négociations
et de faire plus qu'un simple rôle d'arbitre. Si nous voulons parvenir à des
résultats, les Américains ne doivent pas favoriser la partie israélienne étant
donné que les Palestiniens ne concéderont plus rien, notamment en ce qui
concerne les questions du statut final.
- Plusieurs scénarios concernant l'Etat palestinien et sa nature sont
évoqués de temps à autre par Tel-Aviv. Comment réagissent les Palestiniens
?
- Il existe bon nombre de scénarios, dont un qui propose d'attribuer la
localité d'Abou Dis (ndlr : dans la banlieue de Jérusalem) à l'Autorité
palestinienne contre le rattachement de la colonie Maalé Adoumim (ndlr : la plus
grande colonie en Cisjordanie) à Israël. Tous ces scénarios ne nous intéressent
pas et nous les rejetons. Le côté israélien doit nous rendre dans le troisième
redéploiement le reste des territoires, à l'exception de ceux qui font l'objet
de mesures particulières dans le cadre des négociations sur le statut final.
Nous devons obtenir tous les territoires de la bande de Gaza et de la
Cisjordanie, sauf les sites militaires et les colonies dont le sort sera débattu
ultérieurement et qui ne représentent que 5 % des territoires palestiniens. Nous
prévenons les Palestiniens qu'ils ne doivent pas prendre ces scénarios pour des
réalités. Nous ne devons examiner que ce que la partie israélienne présente
officiellement sur la table des négociations. Notre terre ne sera soumise à
aucun marchandage, elle constitue la base sans laquelle il n'y aura pas
d'Etat.
- Comment jugez-vous le fait que les Israéliens dissocient les différents
volets de négociation ?
- Nous refusons le principe de cette politique. Nous croyons qu'une paix
réelle est une paix où tous les volets sont indissociables. L'Egypte, à titre
d'exemple, a établi une paix avec l'Etat hébreu, mais elle est bien consciente
que celle-ci est incomplète tant qu'elle n'est pas soutenue par une paix globale
dans la région. La situation au Sud-Liban n'est pas stable et Israël a levé les
contraintes imposées à la colonisation dans le Golan. Ceci aura des conséquences
néfastes non seulement sur les volets syrien et libanais, mais aussi sur le
volet palestinien et le processus de paix en général.
- Pourquoi les Libanais réclament-ils que le retrait israélien de leur
territoire soit accompagné du désarmement des réfugiés palestiniens au Liban
?
- Après que les Israéliens eurent déclaré être disposés à un retrait
unilatéral du Sud-Liban, la question des réfugiés palestiniens s'est imposée. En
cas du retrait, le Liban ne pourrait pas garantir la sécurité d'Israël, étant
donné que les réfugiés palestiniens peuvent avoir recours au combat pour
récupérer leurs droits. Raison pour laquelle la proposition de désarmer les
réfugiés palestiniens fut avancée. Effectivement, le problème des réfugiés est
épineux, il reflète la dimension humanitaire de la cause palestinienne. Ceci
dit, il ne doit pas être exploité pour servir les intérêts d'une partie.
L'Organisation de libération de la Palestine est le porte-parole officiel des
réfugiés. Il nous incombe de respecter les opinions et les volontés des pays
d'accueil et de coordonner nos efforts pour que cette question ne devienne pas
un objet de marchandage. Nous nous attachons à la résolution 194 de l'Onu
(réclamant le droit au retour des réfugiés palestiniens), dont l'application est
la seule solution.
4. Al Ahram Hebdo du
mercredi 3 mai 2000
Les ministres des Affaires étrangères de Syrie, d'Egypte et
d'Arabie saoudite se réunissent ce mercredi en Syrie pour évoquer les moyens de
"ranimer" le processus
Réunion tripartite à Damas ce mercredi
Les entretiens des ministres des affaires étrangères égyptien, syrien et
saoudien devaient porter ce mercredi sur les efforts arabes à déployer pou
r un règlement final. M. Chareh avait annoncé, lors d'une visite fin avril
à Paris, que cette réunion se tiendrait début mai pour évaluer le processus de
paix. Le président Moubarak a annoncé récemment qu'il envisageait de contribuer
aux efforts destinés à débloquer les négociations syro-israéliennes. Celles-ci
en effet butent sur le retrait du Golan occupé depuis 1967 par Israël. Damas
exige un retrait jusqu'à la ligne du 4 juin 1967, alors qu'Israël veut garder
une bande territoriale sur la rive nord-est du lac de Tibériade.
Dans le même temps, le journal gouvernemental Techrine a affirmé mardi que
l'occupation israélienne du Sud-Liban allait se poursuivre même partiellement ".
Ce qui signifie que la résistance continuera. " Un retrait sans accord
maintiendrait la tension, car la question palestinienne et le problème des
réfugiés ne sont pas résolus, et l'occupation israélienne, même partielle, se
poursuivra, ce qui signifie la poursuite de la résistance légitime " contre
Israël, affirme Techrine. Selon le journal, " Israël occupe la partie libanaise
du mont Hermon, où il a installé des stations de ski, des villages touristiques
et des stations d'espionnage ". Mais, souligne Techrine, " la résolution 425 du
Conseil de sécurité stipule un retrait israélien total de tous les territoires
libanais sans exception, et le gouvernement israélien ne procédera pas à un tel
retrait ". Selon le journal, " Israël ne laissera jamais le Liban progresser et
vivre en paix, et la décision du retrait a été prise pour se venger de ce pays
sous couvert de la légalité internationale ".
Israël a commencé le démantèlement
Dans le même temps, l'armée israélienne a commencé à évacuer une de ses
principales positions, adjacente à la ville de Marjayoun, où est situé son
quartier général au Sud-Liban, au centre de la zone occupée par Israël. Des
camions ont, pendant les trois derniers jours, transporté vers Israël au moins
14 abris préfabriqués en béton armé, retirés de la position israélienne de
Chraiki, dans le secteur central de la zone. Israël a annoncé le retrait
unilatéral de ses troupes du Sud-Liban d'ici 7 juillet.
Chraiki est l'un des sept gros fortins occupés par des soldats israéliens
au Sud-Liban. Ceux-ci constituent l'armature militaire de l'armée de l'Etat
hébreu dans la zone. Sa milice auxiliaire, l'Armée du Liban Sud (ALS), occupe de
son côté moins de 20 fortins.
En outre, du matériel de télécommunications a été démantelé dans le fortin
de Tzipporen. De même des munitions entreposées dans celui d'Olesh ont été
transportées vers l'arrière, a indiqué un porte-parole militaire. Ces deux
postes se trouvent près de la frontière internationale et sont appelés à être
entièrement évacués. Contrairement à celui de Chraiki, ils ne font pas partie
des sept gros fortins israéliens, et sont vraisemblablement destinés à être
remplacés par des positions israéliennes identiques, un peu plus loin, à
l'intérieur d'Israël.
5. Al Ahram Hebdo du
mercredi 3 mai 2000
La colonisation reprend par Rania Adel
Après deux sessions aux Etats-Unis qui n'ont pas permis de parvenir à des
progrès tangibles, les négociations israélo-palestiniennes ont été relancées
dimanche, à Eilat en Israël, sur fond d'irritation des Palestiniens. Les
discussions, dont la colonisation juive est l'un des principaux points, ont
débuté avec presque quatre heures de retard et n'ont duré qu'une heure, les
Palestiniens ayant protesté contre l'annonce d'un appel d'offres, après un gel
de quatre mois décidé par le premier ministre Ehud Barak, pour la construction
de 174 logements à Maalé Adoumim, la principale colonie juive de
Cisjordanie.
" Nous condamnons cette action, car elle est contraire aux accords ", a
déclaré le président palestinien, Yasser Arafat. Il s'exprimait à l'issue d'une
rencontre à Gaza avec l'émissaire de l'Onu pour le Proche-Orient, Terje
Roed-Larsen, portant sur les moyens de promouvoir le processus de paix. " Ces
actions sont illégales et en contradiction avec des engagements et accords
antérieurs et détruisent la confiance de l'opinion palestinienne dans le
processus de paix ", avait auparavant déclaré le négociateur palestinien en chef
Yasser Abd Rabbo. " Nous sommes ici parce que nous sommes sérieux dans ces
négociations. Malheureusement, les récentes mesures israéliennes sur la
colonisation montrent que le gouvernement de M. Barak, lui, ne l'est pas et
c'est très dangereux ", a indiqué M. Abd Rabbo. Il a indiqué avoir transmis ce
point de vue à son homologue israélien Oded Eran et a ajouté avoir demandé
qu'Israël annule cette décision et toutes celles liées à la colonisation en
Cisjordanie et dans la bande de Gaza. Le bureau de M. Abd Rabbo s'est également
adressé à l'envoyé spécial américain, Dennis Ross, et à l'émissaire européen,
Miguel Moratinos, ainsi qu'aux ambassadeurs d'Egypte et de Jordanie afin qu'ils
interviennent. M. Eran a affirmé qu'il allait immédiatement communiquer la
plainte à son gouvernement. " Israël est engagé par tous les accords que les
deux parties ont conclus et signés dans le passé ", s'est-il contenté de
commenter en ajoutant : " nous entrons maintenant dans une phase très importante
de nos négociations et nous espérons, qu'ensemble, les deux délégations pourront
atteindre l'objectif qui nous amènera à une base permanente dans nos relations
".
Israéliens et Palestiniens se sont engagés à conclure d'ici la mi-mai un
accord-cadre établissant les grandes lignes du statut définitif, dont la
conclusion est prévue le 13 septembre prochain, des territoires de Cisjordanie
et Gaza. Celui-ci doit notamment fixer le sort de Jérusalem-Est (annexé par
Israël depuis 1967), de 3,5 millions de réfugiés palestiniens, et des 150
colonies israéliennes ainsi que les frontières de la future entité
palestinienne, les arrangements de sécurité et le partage de l'eau.
En guise de " geste de bonne volonté ", le premier ministre Ehud Barak
s'est dit disposé à transférer aux Palestiniens le contrôle total d'Abou Dis,
El-Azarieh et Suwahara, trois localités arabes proches de Jérusalem-Est, mais
hors des limites municipales et situées en Cisjordanie, où l'Autorité
palestinienne assume déjà les pouvoirs civils alors qu'Israël assure la
sécurité. Inquiet de la réaction de l'extrême droite israélienne, M. Barak a
affirmé qu'" il ne s'agit pas d'un transfert de nouveaux territoires aux
Palestiniens, mais de permettre à ceux-ci d'y assurer la sécurité. Il est
important que nous ayons quelqu'un à qui nous adresser là-bas. Cela renforcera
notre souveraineté sur Jérusalem, notre capitale".
6. Al Ahram Hebdo du
mercredi 3 mai 2000
Israël persiste et signe. Il ne veut pas renoncer à l'arme
nucléaire, contre la volonté de l'ensemble de la communauté
internationale
Israël contre tous
Face aux demandes incessantes, formulées notamment par les pays arabes lors
de la Conférence d'examen du Traité de Non Prolifération nucléaire (TNP), pour
amener Israël à adhérer rapidement à ce traité qui bannit la possession d'armes
nucléaires, Tel-Aviv affiche une fin de non-recevoir.
En effet, Israël a écarté toute révision de sa politique nucléaire sous la
pression de la Conférence d'examen du TNP, tenue actuellement au siège des
Nations-Unies à New York. " Depuis plusieurs décennies, nous maintenons
l'ambiguïté sur nos capacités militaires et n'avons pas l'intention de changer
de politique à ce sujet ", a reconnu le vice-ministre israélien de la Défense,
Ephraïm Sneh. Israël est - avec l'Inde, le Pakistan et Cuba - l'un des quatre
seuls Etats non signataires du TNP, qui interdit aux Etats parties, à
l'exception des cinq grandes puissances, de posséder des armes atomiques. Il
refuse de soumettre ses installations nucléaires à l'inspection de l'Agence
Internationale de l'Energie Atomique (AIEA), s'en tenant à la formule
traditionnelle qu'il ne " serait pas le premier pays de la région à se doter de
l'arme nucléaire ". Malgré les démentis officiels de l'Etat juif, les experts
étrangers lui attribuent de 100 à 200 ogives pouvant être lancées par des
missiles balistiques.
Comme lors de la précédente Conférence d'examen du TNP en 1995, l'offensive
pour contraindre Israël à adhérer au TNP est menée par l'Egypte au nom du groupe
arabe. " Le message de la Conférence d'examen 2000 doit demander sans équivoque
à Israël d'adhérer sans autre délai au traité et de placer ses installations
nucléaires sous le régime de sauvegarde de l'AIEA ", a martelé l'ambassadeur
d'Egypte à l'Onu, Ahmad Aboul-Gheit. En effet, le TNP ne peut avoir aucune
crédibilité parmi les Etats de la région aussi longtemps qu'un Etat est exempté
de ses provisions. C'est ainsi que Le Caire demande à l'Etat hébreu de prendre
des " mesures pratiques " en vue d'entamer des négociations avec les pays de la
région pour établir une zone exempte d'armes nucléaires au Proche-Orient.
Face à cette nouvelle campagne, Israël a indiqué compter sur l'appui des
Etats-Unis, son allié inconditionnel à l'Onu. M. Sneh a effectivement exprimé "
l'espoir " que les Etats-Unis le soutiendrait durant la conférence. Appel
entendu, puisque ces derniers, par la voix de la secrétaire d'Etat, Madeleine
Albright, ont défendu la thèse israélienne selon laquelle la question de
l'armement nucléaire d'Israël ne peut être résolue que dans le cadre de
l'établissement d'une paix durable au Proche-Orient.
Mais pour atténuer les contradictions de leur politique, qui d'une part
réclame une dénucléarisation totale à l'échelle planétaire et, de l'autre,
accorde une exception à Israël, les Etats-Unis ont annoncé qu'ils n'étaient pas
opposés à un examen de la question si cela était fait d'une manière " juste et
équilibrée ". Pour Washington, il s'agit simplement de savoir si la conférence
de New York citera nommément Israël parmi les Etats qui doivent renoncer à
l'arme atomique. Ce que les pays arabes n'avaient pas obtenu en 1995, la
dernière Conférence d'examen du TNP ayant adopté une résolution appelant tous
les Etats de la région à adhérer au traité, sans citer Israël.
7. Le Soir
(quotidien belge) du mardi 2 mai 2000
Atarot, un aéroport en partage ? par Serge Dumont notre
envoyé spécial
On ferme. Les bureaux de la compagnie aérienne israélienne "Arkia" (la
seule qui assure pour quelques jours encore une liaison régulière vers la
station balnéaire d'Eilat) sont quasiment déserts à Atarot. Car ce terrain
d'aviation, que le Premier ministre Menachem Begin rêvait au début des années
quatre-vingt de transformer en un resplendissant "Aéroport international de
Jérusalem", est aujourd'hui moribond. Situé à la limite du camp de réfugiés
palestiniens de Kalandia, le long de la route menant vers Ramallah (la capitale
administrative provisoire de l'Autorité palestinienne), cet aéroport, créé en
1922 par les Britanniques et transformé en base de la RAF durant la Deuxième
Guerre mondiale, dispose d'une piste de deux mille mètres de long. Ce qui lui
permet théoriquement d'assurer l'atterrissage et le décollage de vols courts et
moyen-courriers en provenance ou à destination d'autres aéroports de la
Méditerranée.
Cependant, si Menachem Begin l'utilisait pour partir en voyage officiel à
l'étranger, depuis vingt ans, les rares projets de liaison régulière entre
Atarot et l'Italie, la Turquie et certains pays de l'Est ne se sont jamais
concrétisés. Parce que la communauté internationale ne reconnaît pas l'annexion
par Israël de la partie orientale de Jérusalem conquise durant la guerre des Six
Jours (juin 1967) et parce que l'aéroport se trouve sur un terrain
arbitrairement intégré dans les frontières du "Grand Jérusalem" tracées en 1980.
Résultat ? En 1999, Atarot a enregistré l'arrivée de 408 passagers
internationaux seulement. Essentiellement des voyageurs contraints d'atterrir
là-bas en raison de l'engorgement de l'aéroport Ben-Gourion de Tel-Aviv.
MARCHANDAGE DELICAT
Le sort d'Atarot pourrait cependant être réglé à l'occasion du nouveau
round de négociations israélo-palestiniennes qui débutera dimanche à Eilat. En
tout cas, il est certain qu'il sera l'enjeu de marchandages serrés entre le
négociateur israélien Oded Eran et son homologue palestinien Saeb Erekat, qui se
rencontreront mardi à ce propos. En effet, les accords de paix d'Oslo
garantissent à l'Autorité palestinienne le droit de disposer de deux aéroports.
Le premier, opérationnel depuis 1998, se trouve dans la bande de Gaza, d'où les
trois avions de la Palestinian Airlines assurent des vols réguliers vers la
Jordanie, le Maroc, l'Arabie Saoudite, Dubaï, la Roumanie, Chypre et la Turquie.
Et le second ? Faute de mieux, des plans sont à l'étude pour le construire à
Jéricho, une ville palestinienne dotée d'un complexe hôtelier ultramoderne et
d'un casino. Mais cette solution est onéreuse même si une partie de son
financement serait assurée par la communauté internationale. L'Autorité
palestinienne préfère donc récupérer Atarot, que la presse palestinienne baptise
d'ailleurs déjà "Aéroport de Jérusalem-Kalandia".
Ce que le Premier ministre israélien Ehoud Barak ne semble pas prêt à
accepter. Pas dans un premier temps du moins, puisqu'Israël maintient que
Jérusalem est et restera sa capitale éternelle unifiée. Pas question, dès lors,
d'offrir à Arafat le contrôle sur un aéroport qu'il pourrait ensuite présenter
comme un signe supplémentaire de souveraineté sur Jérusalem-Est.
Durant la trêve pascale, l'entourage d'Ehoud Barak a cependant laissé
filtrer un ballon d'essai selon lequel Atarot pourrait être partagé avec les
Palestiniens. Concrètement, Israël leur accorderait des facilités de décollage
et d'atterrissage tout en conservant la gestion des services et l'application
des mesures de sécurité en vigueur dans tous les aéroports de l'Etat hébreu. Une
solution que le Premier ministre israélien ne semble pas vouloir abandonner mais
dont ni le président palestinien ni ses conseillers ne souhaitent entendre
parler.
8. Le Soir
(quotidien belge) du mardi 2 mai 2000
Les colons juifs organisent la résistance
De l'avis des commentateurs israéliens et palestiniens, les négociations
entre l'Etat hébreu et l'Autorité palestinienne (AP), qui ont repris dimanche à
Eilat, risquent de durer. Car si les Palestiniens prennent comme base de
négociation les résolutions 242 et 338 de l'ONU exigeant d'Israël la restitution
complète des territoires occupés, l'Etat hébreu ne semble, lui, pas près à
accepter d'en restituer plus de septante pourcent. Les trente pourcent restant
sont des villes comme Maaleh Adoumim (où la construction d'appartements se
poursuit) et Ariel ainsi que leur environs, des implantations juives où la
plupart des colons se sont installés depuis 1967.
En tout cas, le Premier ministre israélien Ehoud Barak répète qu'il n'est
pas question de discuter du droit au retour des réfugiés palestiniens, ni de
négocier le contrôle de la partie orientale de Jérusalem-est, où l'Autorité
palestinienne souhaite installer sa capitale. En revanche, M. Barak, qui a lancé
dimanche l'idée d'un référendum sur le contenu de l'accord-cadre
israélo-palestinien en gestation, accepte de restituer aux Palestiniens le
contrôle des villages arabes d'Ezzariye, de Souwahara et d'Abou dis, trois
bourgades où l'administration civile est déjà palestinienne mais où la sécurité
est toujours du ressort d'Israël.
ABCES DE FIXATION
Le progrès est notable même si ces villages (50.000 habitants en tout)
n'ont jamais fait partie du "Grand Jérusalem" tel que le conçoivent les
nationalistes israéliens. D'ailleurs, lorsque Netanyahou était Premier ministre,
l'AP a entamé à Abou dis la construction d'un bâtiment destiné à devenir le
futur parlement palestinien. Sans réaction israélienne significative. En
revanche, aujourd'hui, ces trois bourgades sont devenues des abcès de fixation
pour les nationalistes de l'Etat hébreu. Le Parti national-religieux a confirmé
lundi qu'il quitterait le gouvernement si Abou dis était livrée aux
Palestiniens.
Quant a l'extrême droite, elle mobilise ses troupes sur le thème "Abou dis,
dernier verrou avant de voir Arafat au Mont du temple" (le troisième lieu saint
de l'Islam situé à Jérusalem-est). Ces mouvements, tel Zo Arzenou ("C'est notre
pays"), ont entrepris de nombreuses actions de protestation violentes depuis la
fin de la semaine passée. Des implantations sauvages de caravanes en Cisjordanie
occupée, mais aussi des attaques de soldats chargés de protéger les colonies. De
son côté, l'organisation "Les femmes en vert" appelle les soldats "honnêtes" à
désobéir aux ordres de leurs officiers. Les colons les plus extrémistes auraient
commencé à stocker des armes afin de créer leur propre milice chargée d'assurer
la protection des implantations, voire de s'opposer aux soldats israéliens au
cas où ceux-ci recevraient l'ordre de les démanteler. S. Dt
9. Dépêche de l'agence
Reuters du mardi 2 mai 2000, 20h53
Proche Orient: l'émissaire U.S. Dennis Ross se rend à Eilat
par Wafa Amr
EILAT, Israël - L'émissaire américain Dennis Ross s'est joint aux
pourparlers israélo-palestiniens d'Eilat, symbolisant le soucis de Washington
d'accélérer la mise au point rapide d'un accord-cadre entre les parties.
Ross a rencontré les négociateurs palestiniens à son arrivée sur les bords
de la mer Rouge. Il doit s'entretenir avec les deux parties mercredi.
Le président de l'Autorité palestinienne Yasser Arafat et le Premier
ministre israélien Ehud Barak ont accepté une plus grande implication des
Etats-Unis dans les discussions pour régler des questions délicates telles que
le statut de Jérusalem, les colonies juives, le sort des réfugiés et le tracé
des frontières.
Des deux côtés, on s'entend pour dire que la date limite du 13 mai
initialement fixée pour la mise au point d'un accord-cadre ne sera pas
respectée. Selon des représentants israéliens, elle pourrait être reportée à la
mi-juin, en vue de la signature d'un accord définitif en septembre.
"Nous voulons que le rôle des Etats-Unis se limite à chercher les moyens de
mettre en oeuvre les résolutions des Nations unies, qu'ils ont contribué à
élaborer", a déclaré à Eilat le négociateur palestinien Saeb Erekat. Il faisant
référence aux résolutions 242 et 338 du Conseil de sécurité de l'Onu appelant
Israël à se retirer des territoires envahis en 1967 en échange d'un tracé de
frontières plus sûr et reconnu par la communauté internationale.
Les Palestiniens veulent proclamer d'ici septembre un Etat indépendant en
Cisjordanie et dans la bande de Gaza, avec Jérusalem-Est pour capitale.
Les autorités palestiniennes attendent de Ross des propositions capables de
rapprocher les vues des deux parties.
"Nous allons poursuivre les négociations jusqu'à mercredi soir, puis nous
irons en rendre compte à nos dirigeants. Nous espérons revenir à Eilat
dimanche", a annoncé Erekat.
La séance de négociations en cours a débuté dimanche.
Etat palestinien
"Il est possible que le président Arafat et M. Barak se rencontrent
bientôt, puisque ce sont eux qui prennent les décisions", a déclaré un
négociateur palestinien, Mohamad Dahlan.
Après avoir rencontré des représentants des deux parties, le représentant
de l'Union européenne pour le Proche Orient, Miguel Moratinos, a estimé que des
progrès avaient été accomplis.
"Bien sûr, il reste des questions difficiles. Ils font tout leur possible
pour respecter le calendrier établi", a-t-il déclaré.
"Les Palestiniens m'ont fait part de leurs inquiétudes en ce qui concerne
l'extension des colonies juives. Nous ferons part au gouvernement israélien de
nos préoccupations à ce sujet. Ce n'est pas un très bon moyen de rétablir la
confiance, et toute décision susceptible de mettre à mal cette confiance est
mauvaise", a-t-il poursuivi.
La semaine dernière, Israël a confirmé un projet de construction de 174
logements supplémentaires à Maalé Adumim en Cisjordanie, où se trouve une
importante colonie juive. Cette annonce a provoqué la colère des Palestiniens.
Dans une interview publiée mardi par le quotidien saoudien Okaz, Arafat
interprète l'extension des colonies juives comme le signe qu'Israël n'envisage
pas la paix avec sérieux. Il réaffirme sa détermination à proclamer un Etat
palestinien le 13 septembre prochain.
"(Les négociateurs) essaient de se mettre d'accord sur les frontières de
l'Etat palestinien que doit proclamer Arafat dans le courant de cette année
ainsi que sur la nature de cet Etat", a déclaré à Eilat un représentant
palestinien.
Pour les Palestiniens, Washington ne s'oppose plus à ce projet.
"Quand Arafat était à Washington le mois dernier, le président américain
Bill Clinton lui a dit pour la première fois que les Etats-Unis ne s'opposaient
pas à un Etat palestinien, a déclaré à Reuters un représentant palestinien.
Lundi, le principal représentant de Barak à Eilat à évoqué la perspective
d'une acceptation par l'Etat hébreu d'un Etat palestinien dans la cadre d'un
accord de paix définitif.
10. Dépêche de l'Agence
France Presse du mardi 2 mai 2000, 13h22
Les "aveux" du principal accusé juif font craindre un verdict
sévère
TEHERAN - Les "aveux" du principal accusé dans le procès des juifs iraniens
sur ses activités d'espionnage au profit d'Israël et notamment son apparition à
la télévision font craindre désormais un verdict sévère.
Hamid Tefilin, dit Danny, et considéré comme le "cerveau" du groupe, a crée
un coup de théâtre lors de la deuxième audience lundi de ce procès à huis clos
devant le tribunal révolutionnaire de Chiraz (sud).
"Je suis coupable. Je reconnais les accusations portées contre moi. J'ai
espionné pour le compte d'Israël," a affirmé Tefilin dont les aveux avaient été
diffusés à la surprise générale sur la télévision d'Etat.
"Je suis plein de remords. Je me rends compte à présent que l'Iran est
notre patrie, parce que c'est là que nous vivons", a poursuivi l'accusé.
Alors que les huis clos en Iran sont scrupuleusement respectés, les aveux
de Tefilin, d'abord passés à l'audience, avaient été rapportés illico à la
presse par le porte-parole de la justice, avant l'apparition de l'accusé au
principal journal du soir de la télévision nationale.
Ce genre d'appartition qui avait cours lors des premières années de la
Révolution islamique de 1979, est ensuite devenu plus rare. Le dernier en date
remonte à juillet 1999.
Après les violentes manifestations estudiantines de juillet 1999, certains
d'entre eux avaient été accusés d'avoir été "manipulés par des puissances
étrangères". Et quelques jours plus, un des étudiants accusé d'être un meneur
Manoutchehr Mohammadi, passait des "aveux" complets télévisés indiquant avoir eu
des contacts notamment avec les Etats-Unis.
Le nouveau code pénal iranien, en vigueur depuis 1996, prévoit la peine de
mort "pour toute personne reconnue coupable d'espionnage pour Israël et les
Etats-Unis", deux pays considérés comme "ennemis" de la république islamique et
avec lesquelles l'Iran n'entretienennt pas de relations.
Dans ces circonstances, les éléments de défense deviennent bien maigres. Le
seul sur lequel s'appuyait l'avocat du principal accusé était que son client ne
pouvait être reconnu coupable d'espionnage que si la preuve de la
"confidentialité" des documents était apportée.
"Ce qui n'est pas claire pour nous, c'est que nous ne savons pas de quelles
informations confidentielles il s'agit" et si ces informations sont
véritablement "classées confidentielles", avait indiqué Me Ismaël Nasseri.
Mais Hamid Teflin a aussi demandé à bénéficier "de la clémence de la
justice et du régime islamique", semblant réfuté, à priori, qu'une preuve de son
innocent puisse être apportée.
Dans un commentaire mardi matin la radio a demandé à la justice d'aller
"jusqu'au bout" dans sa détermination et prononcer "un verdict ferme" contre les
espions.
Quelques heures après l'annonce de ces aveux le ministère israélien des
Affaires étrangères a exigé la libération immédiate de ces treize Juifs
iraniens, estimant que "la tentative de (les) présenter comme des espions
(d'Israël) est dérisoire et barbare".
Le procès, dont la troisième audience doit se dérouler mercredi, risque
aussi de devenir un enjeux de politique intérieure dans la mesure où la justice
iranienne, fief des conservateurs, veut asseoir son poids politique à la veille
de la réunion du future parlement où les réformateurs seraient majoritaires.
La justice a ainsi accentué ces derniers jours son offensive tout azimuts
contre les réformateurs avec la fermeture de pratiquement tous leurs journaux et
en traduisant devant le tribunal révolutionnaire leurs personnalités de premier
plan pour leur participation à une conférence controversée tenue au début du
mois à Berlin.
11. Dépêche de l'agence
Reuters du mardi 2 mai 2000, 9h32
Arafat résolu à proclamer un Etat palestinien en
septembre
DUBAI - Dans une interview publiée mardi, Yasser Arafat interprète
l'extension des colonies juives comme le signe qu'Israël n'envisage pas la paix
avec sérieux, et il réaffirme sa détermination à proclamer un Etat palestinien
le 13 septembre prochain.
L'interview du président palestinien est publiée par le quotidien saoudien
Okaz et son titre de langue anglaise, la Saudi Gazette.
Des responsables palestiniens ont déclaré par téléphone à Reuters de
Djeddah que Yasser Arafat avait entamé lundi soir dans le port saoudien une
visite officielle de deux jours dans le royaume, l'un des principaux alliés des
Palestiniens.
Au cours de cette visite, le dirigeant palestinien doit rencontrer le roi
Fahd, le prince héritier Abdallah et le prince Sultan, ministre de la Défense.
"Je les consulterai au sujet des prochaines étapes, compte tenu de
l'intransigence d'Israël, de sa politique de colonisation persistante et de son
non-respect des accords signés par les deux parties", dit Arafat dans
l'interview.
"Comme vous le savez, nous sommes déterminés à proclamer un Etat
palestinien le 13 septembre, si Dieu le veut."
"Patience et fermeté"
Interrogé sur l'autorisation par l'Etat hébreu de la construction de
logements supplémentaires dans la colonie de Maale Adumim, près de Jérusalem,
Arafat déclare:
"Cela met en évidence les objectifs et et les intentions véritables
d'Israël. (Le Premier ministre israélien) Ehud Barak a annoncé la veille de la
réunion d'Eilat qu'ils prévoyaient de construire 187 logements supplémentaires à
Maale Adumin, qui constitue déjà une implantation illégale. Ce la montre
qu'Israël n'est pas enclin à appliquer les accords de paix déjà conclus."
Interrogé sur les pourparlers bilatéraux qui ont repris dans la ville
israélienne d'Eilat, sur la mer Rouge, il répond: "Les négociations en cours
sont très difficiles. Nous espérons cependant parvenir ainsi à un accord-cadre.
Mais cela exige que nous soyons patients et fermes sur nos positions."
Le 13 septembre est la date à laquelle les deux parties doivent en principe
avoir conclu un accord de paix définitif réglant tous leurs litiges. Les
Palestiniens souhaitent que les pourparlers débouchent sur la création d'un Etat
indépendant en Cisjordanie et dans la bande de Gaza.
Le principal représentant israélien aux pourparlers d'Eilat a évoqué lundi
la perspective d'une acceptation par Israël d'un Etat palestinien dans le cadre
d'un accord de paix définitif. Mais ses propos semblent avoir pris de court les
autres membres de sa délégation. Certains ministres du cabinet israélien ont
exhorté Ehud Barak à briser un tabou en adoptant publiquement l'idée d'un Etat
palestinien démilitarisé.
"Nous ne voulons pas qu'ils (les Israéliens) nous donnent ce qu'ils veulent
bien au moment qui leur convient. Ils agissent comme s'ils faisaient un cadeau
au peuple palestinien plutôt que de lui reconnaître ses droits légitimes",
ajoute Arafat dans son interview. "En réalité, Israël a morcelé les accords
(intérimaires) pour pouvoir donner ce qu'il peut éventuellement et garder ce
qu'il veut."
12. Regards du mois
d'avril 2000
Jérusalem-Ankara les dessous d'une alliance par Walid
Charara
La polémique suscitée par les déclarations de Lionel Jospin, qualifiant les
actions de la résistance libanaise de "terrorisme" a eu le mérite de rappeler la
guerre oubliée qui se déroule au Sud-Liban depuis 22 ans.
Après avoir envahi une partie du Sud-Liban en mars 1978, lancé une deuxième
invasion qui ira jusqu'à la capitale, Beyrouth, en juin 1982, s'être
partiellement retiré en mai 1985, le gouvernement israélien annonce sa volonté
de retirer la totalité de ses troupes du territoire libanais avant juillet 2000.
Les récents bombardements contre les infrastructures civiles libanaises (3
centrales électriques) et autres démonstrations de force à distance ne sauraient
occulter l'origine de cette décision : la véritable défaite de l'armée
israélienne face à une guérilla des plus aguerries. Elle intervient, par
ailleurs, dans une phase délicate d'un processus de paix qui était censé
"changer la face du Moyen-Orient", mais qui, plus de huit ans après la
conférence de Madrid, n'a abouti à aucune solution durable ni sur le volet
israélo-syrien, ni sur le volet israélo-palestinien. Le blocage des
négociations, au-delà des positions divergentes des acteurs, découle aussi d'un
conflit des représentations quant à la nature du système régional moyen-oriental
à venir après la paix et à la position de chacun d'entre eux en son sein. Loin
de la rhétorique sur le nouveau Moyen-Orient, chère à Shimon Pérès, et sur la
dynamique du marché intégrateur ouvrant la voie à l'avenir radieux, deux axes
politico-militaires se constituent : l'axe Tel Aviv-Ankara et l'axe Damas-le
Caire-Riyad-Téhéran. Cette nouvelle donne laisse présager, au mieux, une paix
froide et le conflit au Sud-Liban apparaît comme l'une des expressions de la
nouvelle polarisation régionale.
La fin de la guerre civile libanaise en octobre 1990 a constitué un
tournant dans l'histoire du Hezbollah. Consacrant son activité militaire
exclusivement à la résistance contre l'occupation israélienne du Sud-Liban, il
agit parallèlement pour une plus grande intégration dans la vie sociale et
politique du pays et une plus grande ouverture en direction des autres forces
politiques et de l'Etat libanais. Abandonnant le mot d'ordre de République
islamique (1), son programme politique dans son volet intérieur converge sur
beaucoup de points avec ceux des partis de gauche et des partis laïques. Les
élections législatives de 1992 et 1996, qui marqueront le début de son
intégration institutionnelle (respectivement 9 et 12 députés sur un parlement
qui en compte 128), seront une occasion pour une alliance avec ces derniers.
Renforcée par son changement d'orientation politique, son action militaire
fait désormais consensus parmi les forces communautaires et laïques et jouit
d'un soutien considérable de l'Etat libanais, surtout depuis l'élection du
président Emile Lahoud. Son efficacité militaire, son enracinement populaire et
son réalisme politique font de lui, non seulement "une carte gagnante aux mains
du Liban, de l'Iran et de la Syrie", selon son porte-parole Naïm Qassem (2),
mais aussi un interlocuteur crédible, et peut-être un allié pour des acteurs
régionaux "modérés" comme l'Egypte et l'Arabie Saoudite. En témoignent la
récente visite de solidarité du président Hosni Moubarak au Liban, une première
dans l'histoire diplomatique des deux pays, et la déclaration commune
égypto-libanaise appuyant la résistance ; comme la visite et les déclarations du
prince héritier saoudien Abdallah.
Si le soutien au Hezbollah et l'insistance sur l'inséparabilité des
questions du Sud-Liban et du Golan (occupé par Israël depuis 1967) constituent
les seules cartes de pression dont dispose la Syrie dans ses négociations avec
l'Etat hébreu, les prises de position égyptienne et saoudienne dévoilent un
autre aspect du conflit israélo-arabe : la divergence des représentations arabe
et israélienne de l'avenir du système régional après la paix. L'accord de
principe des deux parties sur l'impossibilité d'une issue militaire au conflit
et sur la nécessité d'une solution négociée n'y change rien. Le chercheur Volker
Perthes distingue les deux représentations (3).
La première, "représentation de la complémentarité" qui prône une forme
d'intégration économique régionale, est préconisée par Shimon Pérès, une partie
de l'élite israélienne et les Etats-Unis. L'ouverture des frontières à la libre
circulation des capitaux, des marchandises et des hommes et le développement
d'infrastructures économiques, technologiques et de communications communes
susciteraient, par la dynamique du marché, parallèlement une révolution
copernicienne des esprits, permettant de transcender "les passions"
nationalistes et les "litiges" territoriaux.
La seconde, dite de la séparation, craint que l'intégration régionale ne se
traduise par une domination économique et une suprématie militaire israéliennes.
Le président syrien Assad exprima clairement cette opinion lorsqu'il déclara, en
1994, que Damas préférait le statu quo à une paix aux conditions israéliennes et
américaines. L'Egypte, par la voix de son ministre des Affaires étrangères, M.
Amr Moussa, défend une position similaire.
Le refus des Etats arabes de se voir satellisés par un "marché économique
moyen-oriental" qui aurait pour centre Israël ou de se voir marginalisés
politiquement et stratégiquement par l'alliance israélo-turque, conduira à la
constitution d'un axe syro-égypto-saoudo-iranien. Après avoir longtemps parié
sur un possible rééquilibrage de la politique moyen-orientale des USA en faveur
de partenaires arabes, pari qui les mènera à participer à leurs côtés à la
guerre contre l'Irak, ces pays "redécouvriront" le caractère organique de
l'alliance américano-israélienne. Il est à noter que l'Egypte est l'initiatrice
de cet axe et apporte un soutien précieux aux négociateurs palestinien et
syrien, agissant désormais pour une reconstitution du système régional arabe,
disloqué depuis la guerre du Golfe. Profitant d'une situation intérieure
favorable - victoire sur les groupes islamistes armés, soutien de l'opinion à sa
politique arabe, embellie économique - elle peut à nouveau et se consacrer au
rôle de leader du monde arabe (4).
L'alliance avec la Turquie constitue pour Israël, un retour à ce que
Benjamin Beit Hallahmi appelle "la stratégie périphérique". Elaborée à la fin
des années cinquante, elle reposait sur l'idée qu'Israël devait faire alliance
avec les pays non arabes à la périphérie du groupe des Etats arabes, donc avec
la Turquie, l'Ethiopie et l'Iran (avant la chute du Shah) (5). Une grande
proximité des représentations du rapport à l'Occident et au monde arabe, chez
les élites politico-militaires sionistes et kémalistes, servait de fondement
idéologique à cette alliance. Occultant les réalités géographiques et
historiques, elle procédait à une survalorisation "du lien supposé ou réel à la
culture occidentale et entretenait un évident complexe de supériorité vis à vis
des Arabes, Etats comme individus" (6). Cependant, l'alliance représente
aujourd'hui, grâce au progrès technologique, une révolution géopolitique : "Les
accords de coopération ouvrent aux appareils de combats israéliens la
quasi-intégralité de l'espace aérien turc. Désormais, Israël menace la Syrie sur
trois fronts : Golan, Liban et Turquie.
Elle menace aussi les régions pétrolifères septentrionales en Irak qui se
trouvent à la merci d'une frappe immédiate, massive ou chirurgicale. (...) La
menace devient une variable de la prise de décision iranienne dans le dossier
concernant Israël" (7). Par ailleurs, l'ouverture à Israël de l'immense espace
turcophone qu'est l'Asie centrale ex-soviétique, avec ce qu'elle comporte comme
opportunités économiques et militaires, lui permet de poursuivre une stratégie
de contournement du monde arabe et d'accéder ainsi au rang de puissance
semi-continentale.
Les considérations d'Ankara sont multiples. Il y a d'abord sa volonté de
valoriser son importance stratégique aux yeux des USA dans le monde de
l'après-guerre froide. L'axe Tel-Aviv-Ankara constitue en ce sens la pierre
angulaire du dispositif stratégique global des Etats-Unis au Moyen-Orient. Il y
a ensuite une tentative d'intensifier les pressions sur le voisin syrien avec
lequel la tension n'a cessé de s'accroître ces dernières années en raison de
sérieux différends (la question de l'eau, le soutien au PKK).
Il y a aussi une volonté de profiter de "l'expérience israélienne" en
matière de lutte anti-guerilla. Il y a enfin la possibilité d'obtenir le soutien
du puissant lobby pro-israélien aux Etats-Unis face aux critiques grandissantes
de la violation permanente des droits de l'Homme par Ankara dans le conflit
l'opposant au mouvement kurde, mais aussi face à l'action des lobbies arménien
et grec. La constitution de ces deux axes conjuguée aux évolutions ultérieures
possibles en Irak (l'éclatement du pays suite à un effondrement du régime), dans
les territoires palestiniens (décès d'Arafat avant la conclusion d'un accord
final) ou au Sud-Liban (retrait israélien sans accord préalable avec le Liban et
la Syrie) tracent de sombres perspectives quant à l'avenir de la région. Une
médiation impartiale reste une nécessité pour infléchir le cours des événements,
rôle que l'Europe et, en particulier, la France pourrait jouer, à condition de
maintenir sa politique arabe, contrairement à ce que pense M. Jospin.
1. Libération, 8-3-2000.
2. Magazine, 1-11-99, Beyrouth.
3. Volker Perthes, la Séparation ou la complémen- tarité ?, (en arabe),
Shuiun al Awsat, n° 48, 1-1-96.
4. Bechir Nafie, 8-3-2000, (en arabe), Al Qods Al Arabi.
5. Benjamin Beit Hallahmi, "la Pensée stratégique d'Israël", dans les
Enjeux stratégiques en Méditerranée, éditions l'Harmattan, 1992.
6. Frederic Encel, Israel, grande puissance à venir, LIMES n° 1, hiver
2000, p. 20.
7. Op. cit., p. 21.
13. Dépêche de l'Agence
France Presse du lundi 1 mai 2000, 17h20
La nébuleuse terroriste en mutation, selon
Washington
WASHINGTON - La nébuleuse terroriste internationale est en évolution, moins
liée à des Etats, davantage religieuse que politique, plus ancrée en Afghanistan
ou au Pakistan qu'au Proche-Orient, selon un rapport américain rendu public
lundi.
Ce rapport annuel sur le terrorisme international, rédigé par le
département d'Etat, souligne les "tendances à la mutation du terrorisme"
enregistrées à travers le monde en 1999.
Le document de 107 pages souligne l'évolution d'un terrorisme s'appuyant
sur des "groupes bien organisés, soutenus par des Etats" vers des "réseaux
terroristes aux structures lâches".
Washington relève encore l'évolution d'un "terrorisme aux motivations
essentiellement politiques vers un terrorisme davantage motivé par des raisons
religieuses ou idéologiques".
L'année 1999 a également été marquée par un déplacement des foyers de
terrorisme du Proche-Orient vers l'Asie du sud et plus particulièrement
l'Afghanistan, dirigé par la milice fondamentaliste des taliban, et le Pakistan,
où un coup d'Etat militaire a eu lieu l'an dernier.
Les Etats-Unis rendent hommage à "la plupart des gouvernements du
Proche-Orient" qui ont renforcé leur lutte contre les organisations terroristes,
même s'il reste selon Washington encore beaucoup à faire.
L'Afghanistan, qui abrite le terroriste présumé Oussama Ben Laden, est
qualifié de "premier lieu sûr pour les terroristes", tandis que le Pakistan est
accusé d'avoir envoyé des "signaux contradictoires" dans ce domaine.
Ces deux pays ne figurent toutefois pas sur la liste des pays accusés par
Washington de soutenir ouvertement le terrorisme ou de pratiquer le terrorisme
d'Etat.
Cette liste, qui ouvre la voie à des sanctions économiques spécifiques
américaines, n'a pas bougé depuis 1993 et comprend toujours Cuba, l'Iran,
l'Irak, la Libye, la Corée du Nord, le Soudan et la Syrie.
La Syrie, estime ce rapport, pourrait toutefois se voir retirée de cette
liste si Damas parvient à conclure avec Israël les discussions de paix
actuellement au point mort.
La Corée du Nord, qui a engagé des discussions avec Washington après des
années de rupture totale et qui réclame d'être retirée de la liste, "a été
informée de ce qu'elle doit faire" pour y parvenir, souligne le rapport.
Cuba pour sa part n'est pas considéré comme soutenant activement le
terrorisme, mais reste sur la liste pour son soutien à d'anciens terroristes et
ses liens persistants avec des organisations étrangères considérées comme
terroristes par Washington.
Le rapport relève également une baisse importante du nombre des victimes
d'actes terroristes l'an dernier, avec 233 morts et 706 blessés contre 741 morts
et 5.952 blessés en 1998.
Cette baisse s'explique par l'absence d'attentat ayant provoqué des dégâts
de grande ampleur, comme ceux qui avaient visé en 1998 les ambassade américaines
en Tanzanie et au Kenya.
En revanche, le nombre d'attaques terroristes a augmenté l'an dernier, avec
392 cas comptabilisés à travers le monde contre 274 en 1998.
La raison de cette progression réside dans les "dizaines d'attentats" en
Europe pour protester contre les raids de l'OTAN contre la Serbie durant la
campagne du Kosovo, et aux attentats qui ont suivi l'arrestation en Turquie du
chef séparatiste kurde Abdullah Ocalan. Le rapport souligne également plusieurs
prises d'otages étrangers au Nigéria.
14. Dépêche de l'Agence
France Presse du lundi 1 mai 2000, 17h03
Le procès des Juifs iraniens prend une tournure
délicate
CHIRAZ (Iran) - Le procès des Juifs iraniens jugés pour espionnage et dont
l'affaire avait suscité l'inquiétude de la communauté internationale, a pris
lundi une tournure délicate après l'aveu du principal accusé.
Hamid Tefilin, dit Danny, et considéré comme "le meneur" du groupe, a
marqué la deuxième audience de ce procès à huis clos qui s'était ouvert le 13
avril devant le tribunal révolutionnaire de Chiraz, dans le sud de l'Iran.
Dans cette affaire qui a suscité l'inquiétude de la communauté
internationale, Hamid Tefilin est passé aux aveux, affirmant avoir suivi une
formation en Israël sous la conduite du Mossad (services secrets israéliens),
selon un porte-parole du département de la justice de Chiraz (sud) Hossein-Ali
Amiri.
Ce dernier a ajouté que Hamid Tefilin avait également admis avoir fourni à
l'Etat hébreu des documents confidentiels, dont il n'a pas voulu préciser la
nature. L'accusé a également avoué avoir reçu des informations de la part de
huit Iraniens musulmans, poursuivis dans la même affaire mais qui seront jugés
séparément.
Mais selon M. Amiri, le prévenu a nié avoir recruté des membres pour deux
présumés réseaux d'espionnage qu'il aurait tenté d'implanter à Téhéran et à
Chiraz.
Ces aveux ont été confirmés par l'avocat de l'accusé, Me Ismaël Nasseri,
selon lequel son client, qui s'est rendu à deux reprises en Israël, a également
affirmé avoir reçu 500 dollars par mois sur son compte, sans préciser sur
combien de temps.
Toutefois pour la défense, ces faits ne signifient "en rien" une quelconque
activité d'espionnage dans la mesure où "il n'existe aucune preuve de la
confidentialité des informations échangées".
"Conformément aux lois en vigueur en Iran, voyager en Israël, y suivre une
formation et même échanger des informations avec l'étranger ne sont pas
considérés comme espionnage", explique l'avocat.
Mais "ce qui n'est pas claire pour nous c'est que nous ne savons pas de
quelles informations confidentielles il s'agit" et si ces informations sont
véritablement "classées confidentielles", a ajouté Me Nasseri.
Si l'avocat paraît avoir mis en place son système de défense, le procès
semble prendre une tournure délicate alors que la justice iranienne, dominée par
les conservateurs, poursuivait sa fronde à l'égard de ceux qui sont qualifiés
"d'ennemis" du pays.
Par ce thème sont visés beaucoup de réformateurs dont quatre d'entre eux,
des intellectuels, ont été placés en détention dimanche, suspectés d'avoir
commis des "actions contre la sécurité nationale" pour leur participation à une
conférence controversée tenue au début du mois à Berlin.
Avant les réformateurs, la justice avait sanctionné des journalistes et les
"bases de l'ennemi", la presse réformatrice, comme l'avait qualifiée le Guide de
la république islamique l'ayatollah Ali Khamenei en suspendant 16 titres.
A l'issue des auditions des dix des 13 accusés, l'audience a été levée et
reprendra mercredi matin.
Le procès devrait se tenir sur trois semaines à raison de deux audiences
par semaine, selon le tribunal.
"Nous sommes en faveur d'un procès juste et impartial, et c'est pourquoi
nous ne souhaitons pas que ce procès dure longtemps", a déclaré le juge du
tribunal Sadegh Nourani.
Les trois autres accusés ainsi que huit musulmans, impliqués dans la même
affaire, sont en liberté provisoire.
15. Dépêche de l'Agence
France Presse du lundi 1 mai 2000, 15h57
Le droit à un Etat indépendant n'est pas négociable pour les
Palestiniens
EILAT (Israël) - Les Palestiniens ont insisté lundi sur leur droit à un
Etat indépendant lors de la deuxième journée de négociations avec Israël sur un
accord-cadre à Eilat, dans le sud de l'Etat hébreu.
"Je voudrais souligner que l'Etat palestinien n'est pas une question se
trouvant sur la table (des négociations)", a affirmé le négociateur en chef
palestinien pour les questions de statut final Yasser Abed Rabbo aux
journalistes.
Les négociateurs sont censés parvenir pour le 13 mai à un accord-cadre sur
les grandes lignes d'un règlement sur le statut final des territoires
palestiniens.
Le président de l'Autorité palestinienne Yasser Arafat, qui s'exprimait
lundi à l'issue d'une rencontre à Gaza avec le Premier ministre australien John
Howard, a affirmé qu'un Etat palestinien constituait "un droit naturel" déjà
reconnu dans les accords conclus avec Israël.
Le bureau du Premier ministre israélien Ehud Barak a répliqué dans un
communiqué que "si un Etat palestinien est créé, cela sera le résultat de
négociations". "La position d'Israël sur cette question sera présentée durant
les discussions en fonction de la manière dont elles se développeront", a ajouté
le communiqué.
Les discussions d'Eilat portent sur une série de sujets tels que l'avenir
de Jérusalem-est, le sort des réfugiés palestiniens, ainsi que sur les
frontières et prérogatives de la future entité palestinienne.
Sur le front intérieur, M. Barak s'efforce de colmater les brèches dans sa
coalition qui menace de se disloquer s'il transférait à l'Autorité palestinienne
des localités proches de Jérusalem ou s'il envisageait d'autres concessions,
mêmes mineures.
Selon la radio publique M. Barak a dû reporter au moins jusqu'à la semaine
prochaine la décision du gouvernement sur ces retraits.
De brèves échauffourées ont eu lieu entre Palestiniens et policiers
israéliens à Abou Dis, l'une de ces localités, lors de la visite du maire Likoud
(droite, opposition) de Jérusalem Ehud Olmert et du ministre de l'Intérieur
Nathan Chtcharansky, opposés à ce transfert.
"Proposer sous forme d'avance ou d'une caution une zone située à un
kilomètre du centre le plus sacré de Jérusalem ne peut signifier qu'une chose:
c'est qu'à la fin des négociations nous aurons renoncé à une partie de
Jérusalem", a affirmé M. Chtcharansky. M. Olmert a mis en garde contre des
violences si Abou Dis était est transféré aux Palestiniens.
"J'exige que le statut d'Abou Dis reste ce qu'il a été durant les cinq
dernières années, car s'il change, cela pourrait déboucher sur des
confrontations inutiles entre nous et les Palestiniens", a expliqué M. Olmert
aux journalistes.
La voiture transportant MM. Olmert et Chtcharansky a été attaquée à coups
de pierres par des manifestants palestiniens.
Le président Arafat a par ailleurs dénoncé la publication d'un appel
d'offres du ministère israélien de l'Habitat pour la construction de 174
logements à Maalé Adoumim (Cisjordanie).
"La politique de colonisation du gouvernement israélien a un effet
destructeur sur le processus de paix et affectera les négociations menées pour
parvenir à un accord-cadre", a prévenu M. Arafat.
Un membre de la délégation palestinienne, le colonel Mohammed Dahlan, a
pour part affirmé qu'il "est possible qu'ils (MM. Barak et Arafat) se
rencontrent" à l'issue de la première semaine de discussions, sans toutefois
donner de date précise.
16. Le Magazine
(hebdomadaire libanais) du 28 avril 2000
Portrait d'Elias Khoury : Le singulier universel par Roula
Mouaffak
Engagé dès sa jeunesse dans la cause palestinienne, cet anglophone
d'origine n'a eu de cesse tout au long de sa carrière de se trouver lui-même, à
travers ses voyages, ses multiples rencontres et ses désillusions. Intellectuel
et homme de lettres par excellence, Elias Khoury a changé souvent de casquette :
enseignant de littérature, journaliste,romancier, nouvelliste... Tentative de
portrait d'un homme insaisissable.
Qui est Elias Khoury? Le sait-il lui-même? Fils de la Nakba et de la
révolution palestinienne. Homme des rencontres entre le monde arabe et le
marxisme, la Renaissance arabe et le Coran, la liturgie byzantine et Althusser.
Palestinien sans Palestine, chrétien pour les musulmans, musulman pour les
chrétiens, homme de lettres dans une mosaïque sans modèles, dont l'image doit
être inventée, morceau par morceau. Circonférence à la recherche de son centre.
Toujours à l'avant-garde de tous les combats pour la libération de l'homme, dans
sa marche d'aveugle vers ce qui s'appelle justice. Voilà qui est, à peu près,
Elias Khoury. Car l'histoire n'est pas finie, et ses épisodes futurs peuvent
cacher encore bien des surprises.
Mais d'abord, Elias Khoury est fils de son milieu. La classe moyenne
grecque orthodoxe d'Achrafié. Non le quartier mâtiné d'aujourd'hui, mais le
véritable Achrafié, celui des années d'avant-guerre, l'Achrafié de ceux qui y
ont vécu de père en fils, depuis le début du XIXème siècle. L'Achrafié d'une
maison entourée d'amandiers, de néfliers et de dattiers. De l'école Zahrat
el-Ihsan et du Bon Pasteur, de Sioufi du bon vieux temps, entre l'Eglise grecque
orthodoxe de la Mère de Dieu et les escaliers courant entre les oliveraies en
gradin.
De sa jeunesse, lui revient l'image de militants communistes distribuant
des tracts aux portes de... l'église. Ainsi vont les affinités historiques.
Succédant à la Russie tsariste, l'Union soviétique hérite de cette dernière le
protectorat sur les orthodoxes du Liban et leur communique l'idéologie
communiste. Pas de contradictions, pas de paradoxes. Ainsi le veut une mentalité
bien libanaise. Au point qu'on célébrera, à l'intention de Staline, un très bel
office funèbre en l'église as-Saydé.
Ajouter à ces influences contradictoires celle de la conscience de la
grandeur arabe, insufflée surtout par sa grand-mère maternelle, Hilané Sabbagha,
sœur du fondateur du quotidien al-Ahrar. C'est en effet grâce à elle qu'il lira
les ouvrages de la littérature arabe classique, des poètes de la Jahiliya, dont
les vers sont gravés dans sa mémoire, sans parler du Coran, abordé surtout comme
chef-d'œuvre littéraire, et de la Bible, monument de culture et de spiritualité.
Ce terreau de nationalisme arabe sera contrarié lors de la déclaration de
l'Indépendance, tant le rêve de la patrie arabe, nourri aux romans de Gergi
Zeidane, est encore fort dans certains milieux.
Après un passage obligé dans le Mouvement de la jeunesse orthodoxe de Mgr
Georges Khodr, voilà Elias Khoury à l'âge de l'adolescence, gardant le souvenir
de l'équipée de Suez en 1956, mais réveillé définitivement aux sens des réalités
par la catastrophe de 1967, et livré au grand vent de la résistance
palestinienne naissante.
La défaite catastrophique le surprend, étudiant en première année
d'histoire à l'Université libanaise. Les Palestiniens constatent, une fois pour
toutes, qu'ils doivent prendre en main leur destin et ne plus compter sur les
régimes arabes. Il décide, avec l'inconscience et la témérité de la jeunesse, de
rejoindre leurs rangs, de se faire fedayin. Et voici qu'un jour, il passe aux
actes, range quelques affaires et prend un taxi pour la Jordanie. Arrivé à
Amman, il passe la nuit dans une auberge populaire et, le lendemain, hèle le
premier taxi venu et lui demande de le conduire aux camps d'entraînements de la
résistance. Le chauffeur le conduit à Salt, au sud d'Amman, où il débarque, dans
tout l'enthousiasme de ses 19 ans. Il y est accueilli par un Abou Jihad, Khalil
el-Wazir, encore inconnu, et y reçoit un entraînement de deux mois. Passé cette
période, les responsables du camp renvoient Elias Khoury au Liban, en lui
déclarant qu'il servira aussi bien la cause palestinienne comme intellectuel.
De retour à Beyrouth, Elias Khoury participe à l'organisation d'un colloque
intitulé "Chrétiens pour la Palestine". En fin de travaux, il se rend de nouveau
en Jordanie pour visiter le camp de Bokaa, où il découvre la misère humaine des
déplacés palestiniens. Avec lui, le P. Youakim Moubarak, qui pleure d'émotion à
la vue de tant de misère. Les deux hommes se regardent. Il faut faire quelque
chose. Elias Khoury restera là, s'enrôlera dans l'organisation Fateh, lui qui
déteste les "étiquettes" et participera aux combats des fedayin, qui seront
couronnés par la bataille dite de Kamaré (1969).
Septembre 70, septembre noir
Il rentrera à Beyrouth et fera la synthèse de toutes ces pulsions à travers
la revue Mawakef, fondée par le poète Adonis. Mawakef, c'était alors le
porte-parole de la nouvelle poésie et des intellectuels de gauche. A 22 ans, il
sera membre du conseil de rédaction de la revue, avec Sader Azem, Mahmoud
Darwiche et Halim Barakat.
Septembre 70. Septembre noir. Elias Khoury, une fois de plus, est
bouleversé. Un pan de sa vie bascule. Il quittera le Liban pour Paris, où il
séjournera trois ans, à la recherche de racines encore plus profondes, s'il en
est. D'éducation anglophone, il suit des cours de français intensifs et plonge
avec délices dans l'effervescence de l'après-mai 68: Foucault, Barthes,
Althusser et Alain Touraine structurent et déstructurent tour à tour sa pensée.
En 1975, alors qu'il prépare un DEA sur la guerre civile de 1860 dans le
Mont-Liban, le destin frappe à sa porte sous la forme d'un autobus mitraillé à
Aïn el-Remmané. Le schéma marxiste "classique", constate-t-il, ne s'applique pas
à la situation libanaise. Il abandonne son doctorat et rentre.
Au Liban, il continue de militer pour la cause palestinienne. Il rejoint la
revue du Centre d'études palestiniennes. Il en est le critique littéraire avant
d'en être le secrétaire de rédaction, à l'époque où Anis Sayegh et Mahmoud
Darwiche occupaient le poste de rédacteurs en chef.
L'assassinat du penseur et écrivain Ghassan Kanafani, à Hazmié, dans
l'explosion d'une voiture piégée, lui inflige un nouveau coup dur. Ainsi, on
peut mourir parce qu'on écrit. Elias Khoury découvre que sa vocation réprimée
d'écrivain peut être créatrice de valeurs; qu'écrire, c'est agir, et que la
dichotomie déchirante de ses années de jeunesse peut être ainsi résolue. Comme
le chant, les lettres sont des expressions éternelles de l'émotion humaine et
une forme de lutte pour la justice, la liberté, voire même la beauté.
Sa pensée mûrit et sa synthèse personnelle s'approfondit. Et pourtant, au
milieu de cette synthèse, le vide. Le sentiment d'être encore "en marge" des
choses. De ne pas avoir touché le cœur. D'être encore une circonférence à la
recherche d'un centre. Libanais pour les Palestiniens, Palestinien aux yeux des
Libanais. Musulman pour les chrétiens. Chrétien pour les musulmans. Apatride
culturel errant dans les dédales des grandes œuvres de l'humanité, Libanais
détestant le Liban des communautés, politique détestant les politiciens, le
voilà qui découvre avoir à inventer son identité. Voilà donc qu'il se sent prêt
à écrire.
En 1979, il quitte la revue Affaires palestiniennes et rejoint le quotidien
as-Safir, dont il tiendra les pages culturelles jusqu'en 1991, où il rejoindra
le supplément culturel du Nahar.
Découvreur de réel
Aujourd'hui, si on interroge Elias Khoury sur son métier, il répond:
écrivain. Découvreur de réel. Combattant de l'ombre pour une justice en
rébellion contre toute autorité. Ses personnages sont choisis dans les petites
classes de la société, là où se dit la bonne aventure. Pour écrire la vie d'un
cireur de chaussures, il accompagnera d'authentiques cireurs cinq mois durant, à
l'affût de leurs travaux, de leurs journées, de leurs rencontres, de leurs
vocabulaires. Il étudiera le syriaque pour mieux se mettre dans la peau de l'un
de ses personnages. Trois fois et quatre fois sur le métier remettant l'ouvrage.
Au bout de l'aventure, le plaisir de lire et la connaissance. Parmi ses romans
les plus célèbres, "Bab el-Chams", l'histoire d'amour entre un Palestinien
obligé de fuir sa patrie, en 1948, et son épouse restée en Palestine, fresque
historique ayant pour scène la Galilée.
Romancier, nouvelliste...
Entre-temps, ses pérégrinations universitaires de l'AUB au BUC et à l'UL le
prédisposent, en 1980, à décrocher, avec l'aide d'amis, une bourse à l'Institut
des études arabes de Boston. Edward Saïd l'encouragera à accepter. Un professeur
de littérature arabe ayant pris une année sabbatique, Elias Khoury enseignera
cette matière à l'Université de Columbia. Il y enseignera aussi la littérature
et la technique de narration, notamment dans les "Mille et une nuits".
Romancier, nouvelliste, critique, dramaturge, certaines de ses œuvres sont
traduites en anglais, français, italien et allemand. Ainsi, "Le voyage du petit
Ghandi" (Jouantes) et "Kingdom of strangers" (Arkansas Press). Mais Elias Khoury
ne croit pas à l'immortalité des œuvres. Il pense plutôt que les œuvres sont
écrites dans des langues passibles qui auront besoin d'exégètes pour passer aux
générations futures.
Elias Khoury, c'est aujourd'hui le journaliste qui ne ressemble à personne,
sinon à lui-même, et qui défend jusqu'au bout les causes auxquelles il croit.
Tout dernièrement encore, celle de Marcel Khalifé, accusé d'avoir offensé le
Coran, en mettant en musique un poème de Mahmoud Darwiche contenant une citation
du Livre saint.
Mais il ne faut pas oublier Elias Khoury l'écrivain. Non pas un romancier
en chambre, mais un observateur minutieux des habitudes humaines, un homme de
terrain la loupe à la main, qui met en scène des personnages vrais, qui parlent
et agissent vrai. Il raconte que toute fin de roman pour lui est un moment
déchirant, celui de devoir quitter un monde à cause du mot fin figurant sur la
dernière page de l'ouvrage imprimé.
Il y a aussi Elias Khoury l'intellectuel, celui avec lequel l'actualité
culturelle doit compter. L'homme des grandes causes. Celui auquel on doit
notamment la réouverture du Théâtre de Beyrouth. Une réouverture éphémère suivie
d'une fermeture qui a privé les milieux artistiques libanais d'une véritable
"boussole culturelle".
Il y a enfin Elias Khoury le politicien. Non pas politicien, mais politique
au sens noble du terme. Au sens où la politique est l'art de la chose publique,
de la foi en une cause, de la défense acharnée de certaines valeurs, sans
remords et sans hésitations. L'homme de la cause des causes, de la cause
palestinienne, drame du XXème siècle pour les Arabes, de la perte de la
Palestine bien-aimée. L'homme d'une plume trempée dans l'encre des choses, dans
le sang des peuples, dans la souffrance humaine, dans le déchirement des
histoires impossibles, des rencontres inespérées et des espérances folles.
Déraciné
Et il en a payé le prix. Elias Khoury a été l'un des premiers à avoir été
déraciné d'Achrafié en raison de ses choix politiques. Cela se produisit le 14
avril 1975, au lendemain du mitraillage de l'autobus d'Aïn el-Remmané. Réfugié
dans le milieu cosmopolite de Ras Beyrouth, il s'y heurtera à la montée des
extrémistes islamiques, qu'il n'hésitera pas à dénoncer. Il consignera dans son
ouvrage "La petite montagne" son amour pour son beau quartier perdu.
Aujourd'hui, Elias Khoury est en mesure de rentrer à Achrafié, mais n'a pas
pu encore déloger de son appartement les déplacés qui l'occupent. Quitter le
Liban? Emigrer? Il n'y a jamais songé. Il est l'heureux époux d'une femme
d'exception, Nayla Jreissati, dont le théâtre d'enfants est particulièrement
bien reçu. Talal et Abla, des noms sortis droit de la Jahiliya, constituent son
horizon familial. Le premier étudie l'art cinématographique, la seconde l'art
scénique. La grande blessure toujours ouverte de la Palestine demeure. Le sang
qui en coule a été recouvert par l'histoire occidentale d'un voile épais, d'une
couche de poussière. Sa couleur même a changé. Mais doit-on renoncer à la vérité
s'il a fallu renoncer à la justice ?
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