Appel à communications pour un colloque prévu les 14 et 15 mai 2004 à
l¹Université Paris 7 - Denis Diderot (Pôle des sciences de la ville)
LA MAISON_LIEU DE SOCIABILITÉ
Objet d¹analyse et lieu de vie spécifique, la maison est comprise au sens de
" domus ", d¹habitation, de structure habitative, d¹unité résidentielle,
dans laquelle vit une famille : maison individuelle, appartement dans un
immeuble collectif ou un îlot d¹habitation. Ainsi, le terme " maison " est
utilisé pour décrire un lieu de vie autonome dans une unité résidentielle.
Ce colloque porte sur les pratiques sociales et les conduites ritualisées
dans leurs expressions festives qui se construisent et se développent dans
la maison.
Autrement dit, il s¹agit d¹étudier la maison sous l'angle de la
sociabilité, en s'attachant plus particulièrement aux fêtes, moments
privilégiés de rassemblement du groupe social qui y gravite, soit parce que
les membres de ce dernier y habitent soit par qu¹ils y sont invités.
La sociabilité est l¹aptitude et l¹art de vivre ensemble. " Elle
implique la convivialité et l¹ensemble des gestes et des pratiques
ritualisées qui, dans chaque société, réalisent entre les individus une
cohésion harmonieuse. Au c¦ur de la convivialité, la commensalité apparaît
comme l¹expression même de cet art de vivre ensemble vers lequel tendent les
membres de tout groupe, occasionnel ou permanent, informel ou structuré, qui
fondent, confortent ou manifestent ainsi le lien social qui les unit " dans
une atmosphère de joie .
Néanmoins, cette acception du terme " sociabilité " appliquée à la
maison ne va pas nécessairement de soi. En effet, la notion de " sociabilité
", ainsi désignée, est généralement comprise hors du cadre de la famille et
en dehors des pouvoirs établis que sont l¹Etat et l¹Eglise . Aussi, le champ
d'étude de la sociabilité laisse-t-il à l'écart la famille et par conséquent
dans une certaine mesure l¹espace de la maison.
Pourtant, dès 1983, M. Agulhon suggère de réfléchir à l'histoire du
comportement, du comportement quotidien, dans le privé, ritualisé et
susceptible d'analyses rationnelles, qui inclut la convivialité, mais ne se
limite pas à elle . En effet, la sociabilité ne caractérise pas uniquement "
les lieux, les milieux, les époques où la vie associative fut dense et
animée ". Elle recouvre " les pratiques et les codes de conduites de toute
vie de relations interpersonnelles ". Elle est " un ordre de réalité qui
peut s'observer au sein même du groupe familial, si petit soit-il " , dans
la maison, par exemple, proposons-nous. Elle définit ainsi des relations
tant formelles qu¹informelles, structurées ou non dans cet espace spécifique
dit privé qu¹est la maison urbaine.
Partant de ce postulat, l¹objectif de ce colloque, qui s¹intègre dans une
réflexion plus vaste sur Les usages de la maison, est de comprendre les
mécanismes par lesquels se crée, se construit et se fortifie le lien social
entre citoyens dans des communautés urbaines européennes de l¹Antiquité à
nos jours, tout en établissant des connexions entre ce qu'on appelle
communément l'histoire sociale, l'histoire des m¦urs, l'histoire religieuse
et l'histoire politique, autant de catégories que nous pourrions grouper
sous le vocable d'histoire culturelle, au sens anthropologique. En effet, la
maison, parce qu¹elle apparaît être un lieu privilégié d¹élaboration et
d¹expression de la sociabilité, joue sans doute un rôle majeur dans la
constitution des réseaux urbains.
Le sujet du colloque est donc d¹explorer de quelles façons la maison, alors
qu¹elle est le plus souvent perçue comme le domaine familial et privé par
excellence, opère aussi comme un espace qui lie la famille à une société
urbaine plus large. L¹intérêt est de replacer la maison dans un
environnement urbain caractérisé par une relative densité de constructions
et d¹habitants et par une variété de relations sociales. Ce colloque veut
ainsi éclairer, d¹une part, les relations qui s¹élaborent entre les membres
d¹une famille, d¹un groupe de parents et, d¹autre part, des interactions
sociales plus larges - autrement dit, comment se structurent, se forgent et
se manifestent l¹identité et la cohésion de la famille nucléaire, du cercle
des parents, familiers, amis, voisins et autres - ce qui revient à dire que
la maison est un lieu de sociabilité.
Nous souhaitons engager par conséquent une large réflexion sur les
comportements urbains et précisément sur les liens construits dans la maison
suivant plusieurs directions :
1) La maison, lieu de réception : invitations, repas et fêtes thématique
qui ancre la réflexion dans la problématique plus large des liens entre le
public et le privé et qui pose la question des seuils : types de réunions,
pratiques et acteurs, normes comportementales.
- Qui convie-t-on chez soi, dans sa maison, pour des réunions formelles,
pour des festivités informelles, lors de fêtes familiales, lors d¹autres
fêtes ou encore à des occasions particulières ? Bref qui invite-t-on et
quelles sont les occasions de rassemblement ?
- Pourquoi ces rassemblements sont-ils plus ou moins importants ? Comment se
fait le passage de la réunion de la famille nucléaire à celle d¹un groupe de
parents plus large à celles des amis etc. ? Quels sont les critères qui
président aux choix des convives, à leur qualité ou statut, à leur nombre ?
Quels sont les degrés d¹ouverture de cet espace qu¹est la maison ?
- Quels sont les codes de conduite qui président à ces réunions et
rassemblements divers ? Sont-ils identiques ?
Il s¹agit donc de réfléchir aux différentes pratiques ritualisées ou non et
aux comportements sociaux et normés qui s¹expriment dans une société urbaine
à l¹intérieur d¹un espace spécifique, la maison conduites qui sont
peut-être fonction du groupe social, de son statut, de ses occupations.
2) La maison, un espace de visibilité sociale : il s¹agit d¹appréhender la
dimension publique ou de publicité de ces réunions, les liens créés, la
cohésion et l¹identité du ou des groupe(s) constitué(s) dans la maison.
3) Genre, âge et sociabilité : Est-ce que les différents membres de la
maison hommes, femmes, jeunes, adultes - construisent leurs propres
modèles, formes de sociabilité à l¹intérieur de la maison ?
4) Sociabilité et différenciation de l¹espace : de quelle façon est utilisé
l¹espace de la maison pour recevoir ? Y a-t-il une distinction entre un
espace familial strictement privé, fermé et un espace de réception, social,
public et ouvert ? Qui en établit les limites et comment ? Est-ce que des
termes recouvrent cette différenciation sociale de l¹espace ?
5) Lieux de travail et maison : Comment se construisent des liens de
sociabilité dans une maison qui est associée à un lieu de travail : atelier,
échoppe de marchands, commerce, cabinet médicalS ? Quelles sont les
relations entre l¹espace proprement domestique et l¹espace professionnel ?
Comment la sociabilité opère-t-elle dans chacun de ces espaces ? Y a-t-il
interférences ?
6) Constitution de réseaux relationnels entre public et privé
Comment le groupe de sociabilité créé dans la maison s¹apparente-t-il,
s¹unit-il à des réseaux urbains plus larges liés au travail, à la politique,
à la religion ou autre ? Comment ces différents groupes interfèrent-ils ? La
ville étant un espace de sociabilité structuré et la vie des citoyens étant
enserrée dans de nombreux réseaux de relations, par quel processus et à
quelles occasions, ceux-ci s'en séparent-ils pour prendre possession d'un
espace qui leur est propre, " familier ", tout en le retirant des
contraintes d'une autre socialisation ? Quels sont les liens qui unissent,
les éléments qui séparent la maison, comme structure et espace de
sociabilité, de la communauté urbaine qui est, elle-même, constituée de
multiples groupes de sociabilité ? Un groupe de sociabilité constitué dans
la maison peut-il apparaître comme une nuisance, un groupe de pression dans
l¹espace urbain ?
Les propositions de communications sur les thèmes proposés peuvent être
adressées à Geoffrey Crossick ([log in to unmask]) et à Florence
Gherchanoc ([log in to unmask]) avant le 30 septembre 2003.
Elles devront préciser :
- le nom et la qualité de l¹orateur
- le thème dans lequel s¹inscrit l¹intervention proposée
- le sujet de l¹intervention (développé sur une page)
- une bibliographie succincte sur le thème
Comité d¹organisation :
Evelyne Cohen, Didier Crochin, Geoffrey Crossick, Florence Gherchanoc,
Mireille Vincent
Comité scientifique :
Maurice Agulhon, Louise Bruit, Pascal Dibie, Joseph Isaac, Simone Roux, John
Styles, François Loyer ( ?).
Secrétariat : Christine Tanchoux
Adresse email
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